Sur son serment de douanier, le père de Randa Maroufi déclare s’engager à « considérer comme hôte dans mon pays le voyageur étranger. » Cette pensée nous a inspiré le choix du titre de l’exposition : « L’autre comme hôte ». Pour sa proposition au Centre d’art contemporain Chanot Randa Maroufi rassemble des productions existantes et nouvelles, investiguant des espaces ou des situations transitoires à travers la frontière, l’hospitalité, ou l’identité comme autant de facettes que ces images peuvent revêtir.
La caméra de Randa Maroufi se pose sur des personnes ou faits de société généralement soustraits au regard. Ses projets s’incarnent par des vidéos, photographies, installations, performances et naissent de la rencontre avec des personnes, des lieux, ou encore des images que l’artiste collecte. Cherchant à déplacer les points de vue, l’artiste joue sur les interprétations possibles de moments précis et en propose une approche décontextualisée. Le positionnement de la caméra, la place donnée aux corps, la composition et les choix chromatiques octroient une grande picturalité aux images de l’artiste et génèrent une vidéo aux statuts pluriels. Entre documents et cinéma, les vidéos de Randa Maroufi rendent visibles des situations et créent une fiction à partir de faits concrets. Réincarnant la société établie à la frontière Marocco-espagnole de Ceuta qui vit de l’économie parallèle, l’artiste compose avec les vêtements, les étoffes et inscrit ses images dans l’exercice du pli et du drapé qui jalonne l’histoire de l’art. Les œuvres de Maroufi naissent également d’un temps long de repérage, d’analyse du réel et témoignent d’une grande proximité établie avec les personnes rencontrées qui pour la plupart incarnent leur propre rôle au sein des vidéos. Ses scénarios reflètent l’humanisme qu’elle injecte dans la globalité de sa démarche.
En 2021, le CACC accompagne l’artiste au cours d’une résidence de création, pour la production d’une nouvelle œuvre. Dans cette vidéo co-produite avec le CACC Randa Maroufi met en scène deux hommes, qui tentent, dans un mouvement délicat et fragile de plier un tissu bleu. La résistance dont fait preuve ce drapeau, dévoile la difficulté d’un geste à priori simple. Une chorégraphie tendre et parfois drôle se met en œuvre, luttant contre la matière des plis, des creux et de ce tissu tendu, faisant le portrait de ce rituel du pliage, comme pour revisiter un geste officiel.